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Des coquilles de mollusques de nombreuses espèces ont souvent été analysées, depuis les débuts de la méthode 238U-234U-230Th (dite méthode U-Th), afin de dater les terrasses ou dépôts marins surélevés dans les zones de forts mouvements verticaux. Dans la plupart des cas, malheureusement, ces coquilles se comportent en système ouvert, et la datation se révèle délicate, voire impossible. Dans le cadre d'une étude de la tectonique récente de l'île de Karpathos, dans l'Arc Egéen (projet INSU MOVE), nous avons exploré la possibilité d'utiliser, pour la datation U-Th, des coquilles de scaphopodes, jamais analysées jusqu'ici. Ces mollusques à coquille tubulaire vivent dans les sédiments marins de surface. Les mesures ont été réalisées par ablation laser et MC-ICP-MS.

Les résultats montrent que ces coquilles, dont les points représentatifs dans le diagramme (230Th/238U)-(234U/238U) se situent loin de la courbe d'évolution de l'eau de mer, ont également évolué en milieu ouvert et ne fournissent pas d'âges U-Th fiables. En cela, elles ressemblent aux coquilles de la plupart des mollusques bivalves ou gastéropodes. Leur particularité tient aux valeurs extrêmes obtenues pour certains rapports (234U/238U) et (230Th/238U), jusqu'à 3,12 et 5,15 respectivement. L'analyse de scaphopodes actuels de l'étang de Leucate en Languedoc, montre que leur coquille en aragonite contient au départ peu d'Uranium (quelques dizaines de ppb), alors que les coquilles fossiles ont des teneurs ≥ 1 ppm. Les coquilles fossiles ont donc été enrichies en 238U et en 234U, 230Th, sans doute après l'émersion des sédiments qui les contiennent. Ce processus est vraisemblablement lié à l'infiltration d'eaux à rapport (234U/238U) élevé, et/ou au piégeage des noyaux de recul 234Th (234U) et 230Th à partir d'une source enrichie en U. Nous discuterons de différents modèles de milieu ouvert, dont aucun ne rend parfaitement compte des résultats obtenus.

Les scaphopodes ne semblent donc pas utilisables pour la datation U-Th. Dans les terrasses marines de l'île de Karpathos, étudiées dans ce travail, seul un échantillon de corail aragonitique a pu fournir un résultat fiable à 177 ± 3 ka, un âge en accord avec les données géologiques.