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Les caviomorphes, ou hystricognathes néotropicaux, sont des rongeurs taxonomiquement et écologiquement diversifiés, avec des habitudes alimentaires variées. La première mention du groupe remonte à la fin de l'Éocène au Pérou, néanmoins l'écologie trophique de ces premiers caviomorphes et son impact sur l'évolution du groupe sont peu connus. Afin d'apporter un éclairage sur la paléoécologie des caviomorphes paléogènes, nous avons appliqué une méthode d'analyse de la texture des micro-usures dentaires (DMTA), en particulier une analyse fractale multi-échelle (SSFA), à la surface de l'émail des dents de rongeurs provenant de la séquence stratigraphique de Shapaja (Tarapoto, San Martín, Amazonie péruvienne). Plusieurs niveaux fossilifères ont été retrouvés le long de cette coupe étagée de l'Éocène supérieur à l'Oligocène inférieur (et incluant la transition Éocène-Oligocène TEO).

Nous avons comparé les textures de micro-usure dentaire de 119 spécimens fossiles représentant 11 taxons provenant de plusieurs niveaux distincts de la coupe de Shapaja, à celles d'un référentiel établi sur 858 spécimens sauvages de caviomorphes actuels, répartis en 11 catégories alimentaires.

Nos résultats indiquent des paléoécologies différentes pour les caviomorphes de Shapaja selon les niveaux et âges considérés. Nous retrouvons i) des taxons ayant une tendance à des régimes alimentaires composés d'éléments tendres et ii) d'autres taxons incluant davantage de matériaux durs ou coriaces. Cela indique une disponibilité de ressources variées dans l'environnement ainsi que des stratégies alimentaires distinctes de la part des différents rongeurs étudiés. La présence de taxons persistants, enregistrés sur plusieurs niveaux successifs de la séquence, permet de mettre en évidence une variation intraspécifique des préférences alimentaires chez ces caviomorphes paléogènes. Cette disparité dans les comportements alimentaires se maintient au cours de la TEO, ainsi que dans les premiers niveaux oligocènes étudiés. Cependant, on observe, au contraire, une tendance à un régime alimentaire généraliste chez les quatre taxons du niveau le plus récent (Eoincamys cf. pascuali, n=7 ; Mayomys confluens, n=54 ; Shapajamys labocensis, n=13 ; Tarapotomys mayoensis, n=18), le plus abondamment renseigné, qui pourrait être une réponse à une aridification locale tardive post-TEO.