Le massif du Dévoluy constitue un karst alpin à forte composante verticale, mais qui conserve des réseaux subhorizontaux, témoins d'anciens niveaux de base. L'étude de ces réseaux permet de mieux comprendre l'évolution du massif depuis la fin du Miocène. Une approche pluridisciplinaire combinant analyses morphologiques des conduits, caractérisation des remplissages karstiques, datations U/Pb et paléomagnétisme a permis de reconstituer les principales phases de développement du karst en lien avec la structuration du massif causée par la surrection alpine. Les conduits les plus anciens connus dans le Dévoluy ont été datés à 11,5 ±1,5 Ma par cosmonucléides. Ils sont situés dans la partie nord-ouest du massif entre 2400 et 2250 m et témoignent d'un drainage traversant en provenance des massifs cristallins des Alpes externes. Entre 2 Ma et 3 Ma, au Pliocène, des réseaux subhorizontaux se forment autour de 2000 m d'altitude sur le flanc ouest, toujours selon un drainage traversant. A la fin du Pliocène, une réorganisation progressive du drainage provoque une convergence vers le centre du massif, en direction de l'exutoire actuel. Durant cette période, des émergences aujourd'hui fossiles se mettent en place à mi-hauteur vers 1600 m et drainent un karst déjà largement structuré, composé de conduits vadoses et épi-phréatiques. Depuis le début du Quaternaire, le réseau s'incise progressivement pour atteindre sa configuration actuelle. Des concrétions ennoyées sous le niveau de l'exutoire observées dans les cavités les plus basses témoignent d'une remontée récente du niveau de base liée à la mise en place de sédiments fluvio-glaciaires, causant la réorganisation de la partie basse du système entre 700 m et 1100 m. Les datations par paléomagnétisme sur des remplissages karstiques montrent que tout au long du Quaternaire le karst du Dévoluy continue d'évoluer avec des phases de colmatage et de décolmatage des conduits en réponse aux fluctuations climatiques. L'analyse des dépôts sédimentaires révèle l'enchainement de phases glaciaires et interglaciaires et montre un changement dans la provenance des matériaux, d'une dominante allochtone vers des apports locaux issus des formations mésoozoïques et cénozoïques. Ces travaux soulignent le rôle du karst comme archive de l'évolution des massifs alpins depuis le Néogène.