En géomorphologie, la modélisation analogique vise à reproduire expérimentalement les processus naturels et les interactions complexes qui contrôlent la dynamique des reliefs. Malgré certaines limitations liées à une mise à l'échelle semi-empirique, aux matériaux utilisés et aux conditions aux limites, les expériences analogiques produisent des résultats remarquables, validés par des comparaisons morphométriques avec les reliefs naturels (Graveleau et al., 2015 ; Reitano et al., 2023 ; Dominguez et al., 2025). Bien que l'auto-similarité soit souvent invoquée pour expliquer cette analogie (Paola et al., 2009 ; Reber et al., 2020), les mécanismes fondamentaux ne sont pas encore entièrement compris car la caractérisation physique des paramètres constitutifs des processus morphogénétiques dans les modèles reste techniquement difficile. 

Pour surmonter ces limites, nous avons mis en œuvre une approche intégrée combinant modélisation analogique et modélisation numérique sous Landlab (Hobley et al., 2017 ; Barnhart et al., 2020). L'objectif est de développer un jumeau numérique calibré du modèle analogique et de déterminer, par des méthodes d'inversion, quelles lois et quels paramètres reproduisent le mieux l'évolution morphologique observée expérimentalement. 

La modélisation numérique présente certaines limites car elle n'intègre pas encore les processus de déformation tectonique et certains processus hydrodynamiques. L'exploration de modèles 3D complexes nécessite plusieurs mois de calcul, et mobilise des ressources informatiques importantes. Cependant, l'approche numérique présente des avantages considérables pour la détermination des paramètres des lois morphologiques, car elle permet une exploration efficace d'un large éventail de conditions aux limites, tout en mettant en évidence les corrélations et interdépendances entre les différents paramètres.

Combiner modélisation analogique et numérique représente une stratégie innovante et efficace pour étudier la dynamique des reliefs, en tirant parti des forces des deux approches. La modélisation analogique simule efficacement les principaux processus façonnant l'évolution des paysages, produisant des morphologies réalistes et à haute résolution dans des contextes tectoniques et climatiques complexes. La modélisation numérique fournit des informations quantitatives sur les paramètres physiques et géomorphologiques régissant les processus d'érosion, de transport et de dépôt. L'approche intégrée permet également de tester la pertinence des lois d'érosion utilisées pour étudier les cas naturels, en apportant de nouvelles perspectives sur leur paramétrisation.